Chaque fois que vous entrez dans un bar, vous espérez une rencontre. Vous espérez de l’amour. Vous espérez l’autre. Chaque fois que vous entrez dans un bar pour prendre un café au comptoir en coup de vent, pour passer la journée ou la soirée s’ouvre la possibilité de l’autre. La possibilité d’un rdv avec son destin, réussi ou manqué. Il faut aimer l’humain pour rester dans un bar. Il faut lui laisser une chance de s’approcher de nous.
Le Bar, c’est le point d’eau des bêtes qui paraissent pacifiées pendant quelques heures… les claquements de verres sur le zinc font penser aux trois coups du brigadier avant le lever de rideau. Parce qu’ici c’est toujours la même pièce qui recommence, les mêmes danses des corps qui se contorsionnent pour accéder au comptoir, rejoindre l’autre, le fuir, se cacher ou tout casser avant de rentrer chez soi. Comment se faire aimer ? C’est cette interrogation qui vous saute à la gueule quand vous ouvrez la porte d’un bistrot.
« Ne me dit pas qu’il ne faut aimer personne. » C’est de cette phrase entendue dans un bar il y a quelques années que nous allons partir pour développer une performance dans laquelle il y aura de la contorsion, de la pole dance et du texte.
Les clients et clientes sont là. Ils vivent leur vie. Commandent des verres, discutent, écoutent, vont pisser, reviennent s’assoir. Ce sont des habitués ou des passants. Sur le comptoir une figure étrange est allongée. Un homme. Sur des tables, plus loin, une femme allongée aussi. Petit à petit ils vont se mettre à bouger, se contorsionner et tenter d’entrer en contact avec l’autre sans y parvenir. En tentant d’offrir des verres, en se rapprochant, en s’éloignant. Ils vont tout faire. Pendant ce temps derrière le comptoir, tel un barman, un premier texte sera dit par un comédien. Un texte personnel à la première personne. Il s’agit de jouer sur la confidence. Celle que l’on reçoit parfois quand on reste assez longtemps collé au zinc les yeux dans les yeux avec le patron.
Les contorsionnistes vont se faire plus présents en multipliant les tentatives d’interaction avec les clients jusqu’à arriver sur une barre de pôle dance qui deviendra le centre magnétique du bistrot figurant ce moment de fin de soirée où il y à toujours quelqu’un qui « se donne en spectacle » comme on dit. Pathétique ou merveilleux, ce moment tente une étrange catharsis joyeuse ou pathétique, les lendemains de gueule de bois nous le dirons.
Se mêleront à ces moments, l’apparition de créatures en costumes et masques. Semblant les figures tutélaires du lieu. Elles vont dire le texte et le précipiter à mesure que la performance avance dans une scansion plus poétique pour finir sur la parole qui est toujours la première à entrer dans un bar et la dernière à en sortir. Ces fameux « bonjour, bonsoir » et entre les deux, on l’espère, le miracle.